Intervention de Julia Cagé

Réunion du jeudi 18 janvier 2024 à 10h30
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Julia Cagé, professeure associée en économie au sein du département d'économie de l'Institut d'études politiques de Paris :

La question du non-respect des obligations conventionnelles de CNews n'est clairement pas un problème idéologique mais légal. Du reste, si c'est vous qui étiez invité matin, midi et soir sur cette chaîne, ce serait très exactement le même problème. Il se trouve que c'est au sein des chaînes dont Vincent Bolloré a fait l'acquisition quand il a pris le contrôle du groupe Vivendi qu'on a constaté des dérives, mais un actionnaire ayant une ligne idéologique très marquée à gauche poserait les mêmes difficultés.

Les chercheurs qui s'intéressent à cette problématique, qui est nouvelle, tombent dans une sorte de piège. Ils dénoncent le fait que la chaîne accorde un temps de parole disproportionné, eu égard aux exigences du pluralisme interne, à des intervenants du Rassemblement national. Or le problème n'est pas tant qu'ils soient de ce bord : s'il y avait 100 % d'intervenants de LFI, la question serait la même. Il faut sortir du cas d'école que constitue Vincent Bolloré – sauf qu'il est tellement visible qu'il en devient un exemple parfait pour bien exposer le problème.

La crédibilité de Roch-Olivier Maistre ne sera pas remise en cause dans cette affaire puisque, si je ne me trompe pas, il ne sera plus en poste au moment où la décision sera prise. Il me paraît évident, en revanche, que la crédibilité de l'Arcom est en jeu : son efficacité en tant qu'autorité de régulation, telle qu'elle existe aujourd'hui, fait l'objet d'interrogations partagées. Cela étant, il ne s'agit pas de se demander si l'Arcom perdra ou gagnera en crédibilité selon que l'autorisation de diffusion de CNews sera renouvelée ou non. L'enjeu, ce sont surtout, si renouvellement il y a, les nouvelles obligations qui pourraient voir le jour. S'il y a un renouvellement qui s'accompagne d'une redéfinition des règles pour mesurer le pluralisme interne, d'un droit de veto donné à la rédaction pour le choix de son directeur ou de sa directrice et d'une évolution de la gouvernance ; si tout cela est intégré dans la convention et que l'éditeur décide malgré tout de demander le renouvellement, cela change les règles du jeu. C'est dans ces termes qu'il faut poser le débat.

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